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    Guy de Maupassant : Première neige. Texte publié dans Le Gaulois du 11 décembre 1883.
    Numérisation et mise en forme HTML (14 septembre 1998) : Thierry Selva (maupassant@free.fr)


    Première Neige- Maupassant

        PREMIÈRE NEIGE

     

        La longue promenade de la Croisette s'arrondit au bord de l'eau bleue. Là-bas, à droite, l'Esterel s'avance au loin dans la mer. Il barre la vue, fermant l'horizon par le joli décor méridional de ses sommets pointus, nombreux et bizarres. 
        A gauche, les îles Sainte-Marguerite et Saint-Honorat, couchées dans l'eau, montrent leur dos couvert de sapins. 
        Et tout le long du large golfe, tout le long des grandes montagnes assises autour de Cannes, le peuple blanc des villas semble endormi dans le soleil. On les voit au loin, les maisons claires, semées du haut en bas des monts, tachant de points de neige la verdure sombre. 
        Les plus proches de l'eau ouvrent leurs grilles sur la vaste promenade que viennent baigner les flots tranquilles. Il fait bon, il fait doux. C'est un tiède jour d'hiver où passe à peine un frisson de fraîcheur. Par-dessus les murs des jardins, on aperçoit les orangers et les citronniers pleins de fruits d'or. Des dames vont à pas lents sur le sable de l'avenue, suivies d'enfants qui roulent des cerceaux, ou causant avec des messieurs. 

        Une jeune dame vient de sortir de sa petite et coquette maison dont la porte est sur la Croisette. Elle s'arrête un instant à regarder les promeneurs, sourit et gagne, dans une allure accablée, un banc vide en face de la mer. Fatiguée d'avoir fait vingt pas, elle s'assied en haletant. Son pâle visage semble celui d'une morte. Elle tousse et porte à ses lèvres ses doigts transparents comme pour arrêter ces secousses qui l'épuisent. 
        Elle regarde le ciel plein de soleil et d'hirondelles, les sommets capricieux de l'Esterel là-bas, et, tout près, la mer si bleue, si tranquille, si belle. 
        Elle sourit encore, et murmure : 
        "Oh ! que je suis heureuse." 
        Elle sait pourtant qu'elle va mourir, qu'elle ne verra point le printemps, que, dans un an, le long de la même promenade, ces mêmes gens qui passent devant elle viendront encore respirer l'air tiède de ce doux pays, avec leurs enfants un peu plus grands, avec le coeur toujours rempli d'espoirs, de tendresses, de bonheur, tandis qu'au fond d'un cercueil de chêne la pauvre chair qui lui reste encore aujourd'hui sera tombée en pourriture, laissant seulement ses os couchés dans la robe de soie qu'elle a choisie pour linceul. 
        Elle ne sera plus. Toutes les choses de la vie continueront pour d'autres. Ce sera fini pour elle, pour toujours. Elle ne sera plus. Elle sourit, et respire tant qu'elle peut, de ses poumons malades, les souffles parfumés des jardins. 
        Et elle songe. 

        Elle se souvient. On l'a mariée, voici quatre ans, avec un gentilhomme normand. C'était un fort garçon barbu, coloré, large d'épaules, d'esprit court et de joyeuse humeur. 
        On les accoupla pour des raisons de fortune qu'elle ne connut point. Elle aurait volontiers dit "non". Elle fit "oui" d'un mouvement de tête, pour ne point contrarier père et mère. Elle était Parisienne, gale, heureuse de vivre. 
        Son mari l'emmena en son château normand. C'était un vaste bâtiment de pierre entouré de grands arbres très vieux. Un haut massif de sapins arrêtait le regard en face. Sur la droite, une trouée donnait vue sur la plaine qui s'étalait, toute nue, jusqu'aux fermes lointaines. Un chemin de traverse passait devant la barrière et conduisait à la grand-route éloignée de trois kilomètres. 
        Oh ! elle se rappelle tout : son arrivée, sa première journée en sa nouvelle demeure, et sa vie isolée ensuite. 
        Quand elle descendit de voiture, elle regarda le vieux bâtiment et déclara en riant : 
        "Ça n'est pas gai !" 
        Son mari se mit à rire à son tour et répondit : 
        "Baste ! on s'y fait. Tu verras. Je ne m'y ennuie jamais, moi." 
        Ce jour-là, ils passèrent le temps à s'embrasser, et elle ne le trouva pas trop long. Le lendemain ils recommencèrent et toute la semaine, vraiment, fut mangée par les caresses. 
        Puis elle s'occupa d'organiser son intérieur. Cela dura bien un mois. Les jours passaient l'un après l'autre, en des occupations insignifiantes et cependant absorbantes. Elle apprenait la valeur et l'importance des petites choses de la vie. Elle sut qu'on peut s'intéresser au prix des oeufs qui coûtent quelques centimes de plus ou de moins suivant les saisons. 
        C'était l'été. Elle allait aux champs voir moissonner. La gaieté du soleil entretenait celle de son coeur. 
        L'automne vint. Son mari se mit à chasser. Il sortait le matin avec ses deux chiens Médor et Mirza. Elle restait seule alors, sans s'attrister d'ailleurs de l'absence d'Henry. Elle l'aimait bien, pourtant, mais il ne lui manquait pas. Quand il rentrait, les chiens surtout absorbaient sa tendresse. Elle les soignait chaque soir avec une affection de mère, les caressait sans fin, leur donnait mille petits noms charmants qu'elle n'eût point eu l'idée d'employer pour son mari. 
        Il lui racontait invariablement sa chasse. Il désignait les places où il avait rencontré les perdrix ; s'étonnait de n'avoir point trouvé de lièvre dans le trèfle de Joseph Ledentu, ou bien paraissait indigné du procédé de M. Lechapelier, du Havre, qui suivait sans cesse la lisière de ses terres pour tirer le gibier levé par lui, Henry de Parville. 
        Elle répondait : 
        "Oui, vraiment, ce n'est pas bien", en pensant à autre chose. 
        L'hiver vint, l'hiver normand, froid et pluvieux. Les interminables averses tombaient sur les ardoises du grand toit anguleux, dressé comme une lame vers le ciel. Les chemins semblaient des fleuves de boue ; la campagne, une plaine de boue ; et on n'entendait aucun bruit que celui de l'eau tombant ; on ne voyait aucun mouvement que le vol tourbillonnant des corbeaux qui se déroulait comme un nuage, s'abattait dans un champ, puis repartait. 
        Vers quatre heures, l'armée des bêtes sombres et volantes venait se percher dans les grands hêtres à gauche du château, en poussant des cris assourdissants. Pendant près d'une heure, ils voletaient de cime en cime, semblaient se battre, croassaient, mettaient dans le branchage grisâtre un mouvement noir. 
        Elle les regardait, chaque soir, le coeur serré, toute pénétrée par la lugubre mélancolie de la nuit tombant sur les terres désertes. 
        Puis elle sonnait pour qu'on apportât la lampe ; et elle se rapprochât du feu. Elle brûlait des monceaux de bois sans parvenir à échauffer les pièces immenses envahies par l'humidité. Elle avait froid tout le jour, partout, au salon, aux repas, dans sa chambre. Elle avait froid jusqu'aux os, lui semblait-il. Son mari ne rentrait que pour dîner, car il chassait sans cesse, ou bien s'occupait des semences, des labours, de toutes les choses de la campagne. 
        Il rentrait joyeux et crotté, se frottait les mains, déclarait : 
        "Quel fichu temps !" 
        Ou bien : 
        "C'est bon d'avoir du feu !" 
        Ou parfois il demandait : 
        "Qu'est-ce qu'on dit aujourd'hui ? Est-on contente ?" 
        Il était heureux, bien portant, sans désirs, ne rêvant pas autre chose que cette vie simple, saine et tranquille. 
        Vers décembre, quand les neiges arrivèrent, elle souffrit tellement de l'air glacé du château, du vieux château qui semblait s'être refroidi avec les siècles, comme font les humains avec les ans, qu'elle demanda, un soir, à son mari : 
        "Dis donc, Henry, tu devrais bien faire mettre ici un calorifère ; cela sécherait les murs. Je t'assure que je ne peux pas me réchauffer du matin au soir." 
        Il demeura d'abord interdit à cette idée extravagante d'installer un calorifère en son manoir. Il lui eût semblé plus naturel de servir ses chiens dans de la vaisselle plate. Puis il poussa, de toute la vigueur de sa poitrine, un rire énorme, en répétant : 
        "Un calorifère ici Un calorifère ici ! Ah ! ah ! ah quelle bonne farce !" 
        Elle insistait. 
        "Je t'assure qu'on gèle, mon ami ; tu ne t'en aperçois pas, parce que tu es toujours en mouvement, mais on gèle." 
        Il répondit, en riant toujours : 
        "Baste ! on s'y fait, et d'ailleurs c'est excellent pour la santé. Tu ne t'en porteras que mieux. Nous ne sommes pas des Parisiens, sacrebleu ! pour vivre dans les tisons. Et, d'ailleurs, voici le printemps tout à l'heure." 

        Vers le commencement de janvier un grand malheur la frappa. Son père et sa mère moururent d'un accident de voiture. Elle vint à Paris pour les funérailles. Et le chagrin occupa seul son esprit pendant six mois environ. 
        La douceur des beaux jours finit par la réveiller, et elle se laissa vivre dans un alanguissement triste jusqu'à l'automne. 
        Quand revinrent les froids, elle envisagea pour la première fois le sombre avenir. Que ferait-elle ? Rien. Qu'arriverait-il désormais pour elle ? Rien. Quelle attente, quelle espérance pouvaient ranimer son coeur ? Aucune. Un médecin, consulté, avait déclaré qu'elle n'aurait jamais d'enfants. 
        Plus âpre, plus pénétrant encore que l'autre année, le froid la faisait continuellement souffrir. Elle tendait aux grandes flammes ses mains grelottantes. Le feu flamboyant lui brûlait le visage ; mais des souffles glacés semblaient se glisser dans son dos, pénétrer entre la chair et les étoffes. Et elle frémissait de la tête aux pieds. Des courants d'air innombrables paraissaient installés dans les appartements, des courants d'air vivants, sournois, acharnés comme des ennemis. Elle les rencontrait à tout instant ; ils lui soufflaient sans cesse, tantôt sur le visage, tantôt sur les mains, tantôt sur le cou, leur haine perfide et gelée. 
        Elle parla de nouveau d'un calorifère ; mais son mari l'écouta comme si elle eût demandé la lune. L'installation d'un appareil semblable à Parville lui paraissait aussi impossible que la découverte de la pierre philosophale. 
        Ayant été à Rouen, un jour, pour affaire, il rapporta à sa femme une mignonne chaufferette de cuivre qu'il appelait en riant un "calorifère portatif" ; et il jugeait que cela suffirait désormais à l'empêcher d'avoir jamais froid. 
        Vers la fin de décembre, elle comprit qu'elle ne pourrait vivre ainsi toujours, et elle demanda timidement, un soir, en dînant : 
        "Dis donc, mon ami, est-ce que nous n'irons point passer une semaine ou deux à Paris avant le printemps ?" 
        Il fut stupéfait. 
        "A Paris ? à Paris ? Mais pourquoi faire ! Ah ! mais non, par exemple ! On est trop bien ici, chez soi. Quelles drôles d'idées tu as, par moments !" 
        Elle balbutia : 
        "Cela nous distrairait un peu." 
        Il ne comprenait pas. 
        "Qu'est-ce qu'il te faut pour te distraire ? Des théâtres, des soirées, des dîners en ville ? Tu savais pourtant bien en venant ici que tu ne devais pas t'attendre à des distractions de cette nature !" 
        Elle vit un reproche dans ces paroles et dans le ton dont elles étaient dites. Elle se tut. Elle était timide et douce, sans révoltes et sans volonté. 
        En janvier, les froids revinrent avec violence. Puis la neige couvrit la terre. 
        Un soir, comme elle regardait le grand nuage tournoyant des corbeaux se déployer autour des arbres, elle se mit, malgré elle, à pleurer. 
        Son mari entrait. Il demanda tout surpris : 
        "Qu'est-ce que tu as donc ?" 
        Il était heureux, lui, tout à fait heureux, n'ayant jamais rêvé une autre vie, d'autres plaisirs. Il était né dans ce triste pays, il y avait grandi. Il s'y trouvait bien, chez lui, à son aise de corps et d'esprit. 
        Il ne comprenait pas qu'on pût désirer des événements, avoir soif de joies changeantes ; il ne comprenait point qu'il ne semble pas naturel à certains êtres de demeurer aux mêmes lieux pendant les quatre saisons ; il semblait ne pas savoir que le printemps, que l'été, que l'automne, que l'hiver ont, pour des multitudes de personnes, des plaisirs nouveaux en des contrées nouvelles. 
        Elle ne pouvait rien répondre et s'essuyait vivement les yeux. Elle balbutia enfin, éperdue : 
        "J'ai... Je... Je suis un peu triste... Je m'ennuie un peu..." 
        Mais une terreur la saisit d'avoir dit cela, et elle ajouta bien vite : 
        "Et puis... J'ai... J'ai un peu froid." 
        A cette parole, il s'irrita : 
        "Ah ! oui... toujours ton idée de calorifère. Mais voyons, sacrebleu ! tu n'as seulement pas eu un rhume depuis que tu es ici." 

        La nuit vint. Elle monta dans sa chambre, car elle avait exigé une chambre séparée. Elle se coucha. Même en son lit, elle avait froid. Elle pensait : 
        "Ce sera ainsi toujours, toujours, jusqu'à la mort." 
        Et elle songeait à son mari. Comment avait-il pu lui dire cela : 
        "Tu n'as seulement pas eu un rhume depuis que tu es ici." 
        Il fallait donc qu'elle fût malade, qu'elle toussât pour qu'il comprît qu'elle souffrait ! 
        Et une indignation la saisit, une indignation exaspérée de faible, de timide. 
        Il fallait quelle toussât. Alors il aurait pitié d'elle, sans doute. Eh bien ! elle tousserait ; il l'entendrait tousser ; il faudrait appeler le médecin ; il verrait cela, son mari, il verrait ! 
        Elle s'était levée nu-jambes, nu-pieds, et une idée enfantine la fit sourire : 
        "Je veux un calorifère, et je l'aurai. Je tousserai tant, qu'il faudra bien qu'il se décide à en installer un." 
        Et elle s'assit presque nue sur une chaise. Elle attendit une heure, deux heures. Elle grelottait, mais elle ne s'enrhumait pas. Alors elle se décida à employer les grands moyens. 
        Elle sortit de sa chambre sans bruit, descendit l'escalier, ouvrit la porte du jardin. 
        La terre, couverte de neige, semblait morte. Elle avança brusquement son pied nu et l'enfonça dans cette mousse légère et glacée. Une sensation de froid, douloureuse comme une blessure, lui monta jusqu'au coeur ; cependant elle allongea l'autre jambe et se mit à descendre les marches lentement. 
        Puis elle s'avança à travers le gazon, se disant : 
        "J'irai jusqu'aux sapins." 
        Elle allait à petits pas, en haletant, suffoquée chaque fois qu'elle faisait pénétrer son pied nu dans la neige. 
        Elle toucha de la main le premier sapin, comme pour bien se convaincre elle-même qu'elle avait accompli jusqu'au bout son projet ; puis elle revint. Elle crut deux ou trois fois qu'elle allait tomber, tant elle se sentait engourdie et défaillante. Avant de rentrer, toutefois, elle s'assit dans cette écume gelée, et même, elle en ramassa pour se frotter la poitrine. 
        Puis elle rentra et se coucha. Il lui sembla, au bout d'une heure, qu'elle avait une fourmilière dans la gorge. D'autres fourmis lui couraient le long des membres. Elle dormit cependant. 
        Le lendemain elle toussait, et elle ne put se lever. 
        Elle eut une fluxion de poitrine. Elle délira, et dans son délire elle demandait un calorifère. Le médecin exigea qu'on en installât un. Henry céda, mais avec une répugnance irritée. 

        Elle ne put guérir. Les poumons atteints profondément donnaient des inquiétudes pour sa vie. 
        "Si elle reste ici, elle n'ira pas jusqu'aux froids", dit le médecin. 
        On l'envoya dans le Midi. 
        Elle vint à Cannes, connut le soleil, aima la mer, respira l'air des orangers en fleur. 
        Puis elle retourna dans le Nord au printemps. Mais elle vivait maintenant avec la peur de guérir, avec la peur des longs hivers de Normandie ; et sitôt qu'elle allait mieux, elle ouvrait, la nuit, sa fenêtre, en songeant aux doux rivages de la Méditerranée. 
        A présent, elle va mourir, elle le sait. Elle est heureuse. 
        Elle déploie un journal qu'elle n'avait point ouvert, et lit ce titre : "La première neige à Paris." 
        Alors elle frissonne, et puis sourit. Elle regarde là-bas l'Esterel qui devient rose sous le soleil couchant ; elle regarde le vaste ciel bleu, si bleu, la vaste mer bleue, si bleue, et se lève. 
        Et puis elle rentre, à pas lents, s'arrêtant seulement pour tousser, car elle est demeurée trop tard dehors, et elle a eu froid, un peu froid. 
        Elle trouve une lettre de son mari. Elle l'ouvre en souriant toujours, et elle lit : 

                 "Ma chère amie, 

        "J'espère que tu vas bien et que tu ne regrettes pas trop notre beau pays. Nous avons depuis quelques jours une bonne gelée qui annonce la neige. Aloi, j'adore ce temps-là et tu comprends que je me garde bien d'allumer ton maudit calorifère..." 

        Elle cesse de lire, toute heureuse à cette idée qu'elle l'a eu, son calorifère. Sa main droite, qui tient la lettre, retombe lentement sur ses genoux, tandis qu'elle porte à sa bouche sa main gauche comme pour calmer la toux opiniâtre qui lui déchire la poitrine. 

    11 décembre 1883


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    Voyage de la 1ère L aux châteaux de la Loire - Mars 2016

    Premières photos avant les vôtres...

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    Devant le château de Chambord

     

     

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    Dans la cour du château

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    Au château d'Amboise

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    Animation by Walid

     

    Belle voix !

     

     

    Photos d'Amel

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  • Le Mythe de Sisyphe- Camus

    "Ô mon âme, n'aspire pas à la vie immortelle mais épouse le champ du possible."

                                                                                                                                     Pindare

    Oeuvre surprenante et géniale d'un jeune vieillard de trente ans, délivrant une sagesse d'ancêtre dans la bouche d'un jeune homme.

    " - Chez Camus, il y a le talent, la gravité, la profondeur, l'humanité, si bien qu'en vérité, sincèrement, je tiendrais davantage à ce que mes enfants lisent Le Mythe de Sisyphe, plutôt que le Journal du séducteur ou le Traité du désespoir.

    - Même La critique de la raison pure ?

    - surtout La critique de la raison pure. Camus n'est pas Aristote, Camus n'est pas Kant. (...) Mais au fond, que mes trois garçons lisent ou pas un jour La critique de la raison pure ou L'éthique à nicomade, ce n'est pas du tout un problème. On peut très bien vivre , être un homme formidable, sans avoir lu La Critique...ou L'éthique à nicomade. S'ils ne lisaient jamais Le Mythe de Sisyphe, j'en serais peiné, blessé, un peu inquiet pour eux..."

                                                                                                                                               André Comte-Sponville

     


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  • Correction ludique des fautes d'orthographe

    http://bescherelletamere.fr/


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    Comment mettre en scène La Guerre de Troie  n’aura pas lieu ?

     

    Giraudoux avait rencontré en Jouvet un allié parfait. Le premier considérait le second comme un maître de la diction et de l'interprétation, Jouvet considérait Giraudoux comme une auteur "classique", universel et atemporel. Mais ils avaient surtout en commun la même conception de l'espace scénique et de la mise en scène. Le dramaturge assistait aux répétitions, opérant des modifications à ses indications scéniques, prenant en compte les remarques ou suggestions du metteur en scène. Giraudoux écrira spécifiquement pour la troupe de l'Athénée dirigée par Jouvet, comme Marivaux écrivait pour les comédiens italiens. 

    Plusieurs défis se présentent au metteur en scène, et les différents choix qu’il effectuera dépendront de sa propre interprétation de la pièce mais aussi de la « traduction » qu’il voudra en proposer aux spectateurs.

    Nous l’avons dit en cours, une mise en scène est une réécriture, et le metteur en scène peut  être considéré comme un co-auteur de l’œuvre. Il réécrit « scéniquement » le texte produit par le dramaturge.

    Questions qui peuvent se poser :

    ·        Le décor :

    - le décor doit-il camper à gros traits un cadre antique, établissant un lien étroit avec   l’épopée ? Doit-il replonger le spectateur dans cet univers légendaire, qui mettra en évidence l’intertextualité entre les deux textes ? Un tel décor mettra davantage en évidence les anachronismes de la pièce, notamment concernant le langage.

    - doit-il au contraire se référer aux années 1930, époque de l’écriture et de la représentation, afin de bien souligner l’aspect actuel du conflit qui se prépare ?

    - doit-il enfin évoquer une époque indéfinie, indéterminée, pour montrer que les enjeux de cette pièce sont universels et atemporels ?

    ·        Les costumes :

    -  la conception des costumes repose sur les mêmes options : antiques ? Modernes ? Sans référence historique précise ?

    - peut-on mélanger deux époques ?

    - doit-on présenter Hector en habit de guerrier, pour souligner qu’il n’est pas un lâche, et qu’il refuse la guerre par humanisme et non par crainte ? Doit-on au contraire le vêtir d’un costume de prince ? De « sage » ?

    - Hélène doit-elle être prendre l’apparence d’une « déesse », comme il est habituel de les représenter en peinture et en sculpture, aussi bien dans l’antiquité qu’à l’époque classique ? Ou faut-il l’habiller et la maquiller comme une starlette, pour la « désacraliser » ?

    ·        Les personnages :

    - le  choix des comédiens relève également d’un point de vue très subjectif : comment représenter des « héros », des personnages mythologiques qui ont traversé les époques et alimenté les imaginaires collectifs ?

    - comment incarner la plus belle femme du monde ? D’autant qu’Hélène n’apparaît pas dans l’immédiat, il faut attendre plusieurs scènes pour la découvrir sur scène. Ce retard provoque chez le spectateur une attente qui peut être rapidement déçue. L’actrice doit-elle nécessairement « belle » ? Mais selon quels canons ?

    - nous l’avons vu avec Ionesco, qui ne supportait pas qu’un metteur en scène prenne des libertés avec ses indications scéniques, la question des didascalies rédigées par l’auteur reste au cœur des dissensions entre auteur et metteur en scène. Quand le texte en comporte très peu, le metteur en scène est libre d’ajouter des gestes, des déplacements, des accessoires, ce qui lui permet de « créer », sans nécessairement trahir. Mais lorsque le metteur en scène passe outre les didascalies ou les modifie profondément, ou s’il change le sens de la pièce en transformant l’identité du personnage,  son interprétation de l’œuvre peut être jugée comme une trahison.

    - les conditions matérielles de la représentation sont parfois à la source du non respect des didascalies. Voici un témoignage intéressant à ce propos :

    « La pièce a été reprise avec succès au T.N.P, en 1963. (…). Ce qui nous a frappés, c’était une ou deux erreurs de mise en scène. Nous les signalons car il serait regrettable qu’elles se répètent. On peut comprendre que l’on n’est pas respecté l’indication de Giraudoux à la fin de sa pièce (le rideau commence à tomber au moment où Hector vient de tuer Démokos), parce qu’il n’y a pas en principe de rideau au T.N.P. et que de toute façon l’on peut craindre que le public ne croie la représentation terminée et ne se mette à applaudir, - ce qui serait compromettre le coup de théâtre qui suit. En revanche, le metteur en scène a commis une sorte de contresens en escamotant le tableau final. Giraudoux a écrit : « Les Portes de la Guerre s’ouvrent lentement. Elles découvrent Hélène qui embrasse Troïlus. » Supprimer cet effet saisissant c’est ôter à La Guerre de Troie une de ses dimensions, celle de l’absurde, et frustrer l’auteur d’une trouvaille. (Etienne Frois- Profil d’une Œuvre- Ed. Hatier)

     

    Mise en scène de Louis Jouvet- 1935- Théâtre de l'Athénée

    Comment mettre en scène La Guerre de Troie...

    Comment mettre en scène La Guerre de Troie...

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    Comment mettre en scène La Guerre de Troie...

    Comment mettre en scène La Guerre de Troie...

     La mise en scène de Louis  Jouvet  se réfère  à l'antiquité sans pour autant la représenter. En cela, il est fidèle à l'esprit de la pièce. Le mythe ancien est suggéré par les colonnes et le chapiteau, par les costumes fluides et drapés évoquant les toges, le péplos ou le chiton.

    Le décor, massif, semble écraser les personnages comme le destin qui les tient entre ses mains. Il donne également une certaine solennité, une dimension majestueuse à l'intrigue. L'espace scénique est spacieux, donnant une grande liberté de mouvement aux comédiens.

    Jouvet interprète le rôle d'Hector. Sur ces photographies, son allure, les différentes positions qu'il adopte, ainsi que son prestige d'acteur et de metteur en scène reconnu, en font un personnage fort, calme, protecteur.

    Hélène est incarnée par Madeleine Ozeray. Elle correspond totalement aux canons de beauté de l'époque, mince, un peu sophistiquée, d'une blondeur froide, le teint pâle, le visage fin. Cette image de la femme élégante et difficile à atteindre persistera jusque dans les années cinquante, aussi bien au théâtre qu'au cinéma. Les actrices célèbres de ces décennies en sont la preuve : Michèle Morgan, Grace Kelly, Tippi Hedren... 

     

    Mise en scène de Jean Vilar au TNP- 1963

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    Jean Vilar opte également pour un ancrage dans l'Antiquité, mais une antiquité encore plus factice, encore plus théâtralisée. Les costumes ressemblent davantage à des costumes, stylisés, ainsi que les coiffures. Nous sommes bien au spectacle. Mais fait surprenant, Hélène est interprétée par Christine Minazzoli ( troisième image, au centre) une comédienne brune, coiffée avec modernité contrairement aux autres actrices. Est-ce le moyen de la rendre "différente"? Spéciale? N'oublions pas que chez les troyens, Hélène la grecque possède une beauté exotique, peu commune puisqu'elle appartient à un peuple étranger.

    On peut noter également que les troyens sont vêtus de couleurs claires alors qu'Ulysse ( à droite sur la première image, interprété par Jean Vilar lui-même),  porte un costume de couleur sombre. Tout comme Jouvet dans le rôle d'Hector, Vilar donne à Ulysse une dimension plus grande, plus importante, grâce à son âge, à son expérience et à sa renommée.

      

     Mise  en scène de Nicolas Briançon, au théâtre Silvia-Monfort- 2006

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    Nicolas Briançon propose une interprétation plus personnelle et sans aucun doute plus moderne, visant à actualiser la pièce. Mais de quelle modernité parle-t-on? Quelle période le décor et les costumes suggèrent-ils? Les années 30 ? Les années 2000? L'aspect guerrier d'Hector se traduit par   un costume sportif et de grandes bottes noires. Hélène entre dans la tradition, cheveux blonds et longs, robe blanche, mais son jeu exprime davantage le badinage, la coquetterie,  qu'il n'évoque la femme fatale suscitant passion et adoration. (voir les vidéos ci-dessous).

    Annie Duperey dans le rôle d'Hélène, Mise en scène de Raymond Rouleau- 1982

     

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    Caroline Cellier- 1967 

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    Diane Kruger dans le film Troy, de Wolfgang Petersen

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    On peut remarquer qu'à travers les époques certaines constantes demeurent dans la représentation d'Hélène, et une sorte de stéréotype de la beauté féminine apparaît : cheveux longs, ondulés, front dégagé, menton étroit; élégance de la parure. Plutôt blonde et de peau blanche.

     

    Mise en scène de Francis Huster, au festival d'Anjou- 2013

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    La mise en scène de Francis Huster doit s'adapter à une représentation en extérieur. Le décor est encore plus  épuré   que  dans les précédentes propositions. Une table moderne, et des chaises qui envahissent l'espace, comme dans une salle d'attente ou comme au spectacle : théâtre dans le théâtre?  C'est bien la comédie des hommes face à leur destin qui se joue. 

    Les costumes, l'affiche : tout évoque l'époque de la création de la pièce. Les femmes, cependant, qui représentent le parti pris de la paix, sont habillées avec sobriété et élégance, hormis Cassandre et Hélène.

    Hélène retrouve  sa blondeur et sa pâleur habituelles. Son costume doré rappelle son exception et son charme de déesse. A moins que les paillettes et la robe qui colle au corps ne soulignent son côté "starlette", tel que nous l'avons vu lors de l'étude du premier extrait de la pièce.

     


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